Comprendre les résultats chiffrés et les cotations d’un bilan psychomoteur

Mise à jour : Octobre 2024 (Aurélien D’Ignazio, Oceanie Le Borgne, Elodie Lemoine)

Les tests

Lors du bilan psychomoteur, le professionnel croise :

  • des observations qualitatives (particularités comportementales, réactions émotionnelles, aisance corporelle, stratégies individuelles…), avec
  • des données quantitatives (les cotations et résultats chiffrés issus de différents tests visant l’évaluation de certains domaines psychomoteurs).

L’objectif d’un test est de situer l’enfant par rapport à sa classe d’âge (ou son niveau scolaire) : est-il plutôt efficace dans le domaine évalué ? inscrit dans la moyenne ? relativement faible par rapport aux autres ? significativement déficitaire ?

Les professionnels pouvant être à l’origine de la demande de bilan (médecin, enseignant, MDPH…) y sont particulièrement attentifs. En effet, ce dernier peut contribuer à la pose de diagnostic, la justification d’aménagements scolaires ou encore la notification d’aides matérielles, humaines et financières nécessaires.

Ces tests ont été validés sur des critères de sensibilité (les résultats sont suffisamment discriminants), de fiabilité (ils ciblent un domaine précis), de standardisation (les protocoles de passation sont rigoureusement identiques) ainsi que d’étalonnage (chaque test a été passé auprès d’une large population de référence afin de pouvoir situer un résultat par rapport à une moyenne).

La considération des scores aux différents tests permet une interprétation (apporter une signification aux résultats) tout en situant la personne en fonction de son âge, au regard d’une norme.

test psychomoteur cotation

Les chiffres permettront, en lien avec le regard clinique, d’établir un plan de soin. Ils servent à nuancer et/ou appuyer les répercussions des difficultés au quotidien et dans les apprentissages.

Concrètement ?

Concrètement, le praticien récolte des données lors de son bilan, sous différentes formes quantitatives (une quantité de points attribués, un temps écoulé, un nombre d’essais réussis…). Il s’agira de notes brutes, qui seront ensuite converties (à l’aide de tableaux de cotations et de calculs, selon la classe ou l’âge) en résultats étalonnés.

Ces résultats peuvent s’exprimer en notes standards (N.S), en déviations standards (D.S) ou encore en percentiles. Il s’agit de normes internationales communes à de nombreux tests d’autres professionnels (psychologues, neuropsychologues, médecins…) et sont par ailleurs utilisées dès les premiers mois de vie pour quantifier les mesures d’un bébé sur son carnet de santé.

Selon le domaine concerné, les notations permettent de situer un résultat comme  :

  • supérieur à la moyenne d’âge de l’enfant
  • conforme aux performances attendues
  • légèrement en deçà des performances attendues (nous parlerons de « zone de fragilité », pouvant déjà être évocatrice de point de vigilance, voire de proposition de soins pour éviter que l’écart ne se creuse)
  • nettement en deçà des performances attendues (nous parlerons de « zone déficitaire », pouvant évoquer un trouble ainsi qu’une prise en soin adaptée)
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⚠️ Nous précisons que plusieurs « zones de fragilités » retrouvées chez un même enfant peuvent correspondre, dans les faits,  à un tableau global pathologique de part l’association des déficits (pénalisant notamment d’éventuels moyens de compensation).

Par exemple, si l’écriture d’un enfant est modérément impactée en qualité (- 1 D.S) et à la fois modérément impactée en vitesse (- 1 D.S), alors cela peut refléter une dysgraphie (Mojet, 1991).

Repères pour comprendre les différentes cotations

  • Les Notes Standards (N.S) (souvent exprimées par une note sur 19)

 Le terme de notes standards indique qu’il s’agit de résultats normalisés pouvant permettre la comparaison par rapport à une norme de référence. Ce type de résultat (provenant d’un échantillon statistique) n’est pas comparable avec une note de type résultat scolaire (provenant du barème d’un professeur). À titre d’exemple, une note standard de 11/19 peut sembler un score médiocre pour le « grand public » alors qu’elle correspond en réalité à un résultat tout à fait attendu au regard de l’âge de l’enfant.

-La moyenne absolue est de 10 mais on estime l’intervalle moyen (entre la moyenne haute et la moyenne basse) entre 8 et 12

-La zone de fragilité se situe entre 5 et 7

-La zone déficitaire  se situe pour un résultat inférieur ou égal à 4

⚠️ Ces valeurs-seuils pouvant légèrement différer selon les intervalles psychométriques propres à chaque test.

  • Les Déviations Standards (D.S) (on retrouve également l’appellation note Z)

Les déviations standards correspondent à l’expression d’un score par rapport à la moyenne des scores d’un groupe dans une unité (fraction d’écart type). Elles permettent d’évaluer la dispersion des mesures autour d’une valeur moyenne.

-La moyenne absolue est de 0 D.S mais on estime l’intervalle moyen entre -1 D.S et +1 D.S

-La zone de fragilité se situe entre -1 et -2 D.S

-La zone déficitaire  se situe pour un résultat inférieur ou égal à -2 D.S

  • Les Percentiles  (ou Rangs Centiles ou encore Centiles)

La traduction rigoureuse de l’anglicisme percentile est « rang centile ».

Les rangs centiles fournissent une estimation de la position d’un enfant par rapport aux autres enfants de même âge. Il faut imaginer des centiles comme des portions d’un échantillon de référence de 100 portions de la même taille. Si un enfant se situe au centile 25, cela signifie que 75% des enfants du même âge ont obtenu un résultat supérieur à lui pour ce test.

-La moyenne absolue se situe au 50° centile mais on estime l’intervalle moyen entre le 15° et le 85° centile

-La zone de fragilité se situe entre le 5° et le 15° centile

– La zone déficitaire se situe pour un résultat inférieur au 5° centile

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⚠️ La généralisation absolue de ces valeurs à tous les outils d’évaluation n’est pas toujours applicable, car certain tests peuvent ajuster leurs seuils au regard de retours cliniques. Nous aborderons par la suite la question des cutoff.

Tableaux récapitulatifs des cotations

Courbe de Gauss récapitulative des cotations

La plupart des tests sont construits de manière à ce que les performances observées dans la population générale suivent une courbe de Gauss. Celle-ci permet de montrer la répartition attendue dans la population dite « normale ». Elle se définit par une moyenne et un écart-type : la variation autour de la moyenne retrouvée dans la population constituée de sujets du tout-venant (issus de milieux socio-professionnels variés pour éviter les biais de sélection). Plus l’étalonnage est grand et plus le test est sensible.

Quelles limites ?

a/ Absence de cutoff ou de révisions des cutoff

En psychométrie, le terme cut-off (ou seuil de coupure) fait référence à une valeur ou un score spécifique qui sert à délimiter deux catégories ou plus dans une évaluation ou un test psychométrique. Ce seuil permet de classifier les résultats d’un test, généralement pour identifier des groupes de personnes en fonction de leur performance (par exemple, ceux qui réussissent ou échouent, ou qui appartiennent à différentes « tranches » de capacité).

Comment faire lorsque le test ne présente pas de cutoff précis ? Sur quelle base situer notre patient par rapport à ses pairs pour évaluer son fonctionnement ? En l’absence de « seuil » établi, il est possible de se référer à la courbe gaussienne et sa tendance globale. Il conviendra néanmoins de rester prudent si une précision au sujet des seuil pathologique est mentionnée.

Il demeure donc important de veiller aux potentielles modifications, revues, études autour de ces évaluations normées et adapter nos pratiques en rapport (à l’image des modifications du cutoff du M ABC 2 par exemple).

b/ Vérifier les qualités métriques des tests

Outre les cutoff, il existe bien d’autres points de vulnérabilités à garder en tête en ce qui concerne les tests standardisés. Nous pourrions  évoquer les étalonnages parfois très anciens, parfois peu conséquents (regardons le N, soit le nombre de sujets sur lequel a été bâti l’étalonnage) ou encore normés sur une population non française.

Il est également indispensable d’observer les critères de sensibilité, de spécificité ou de fidélité des évaluations proposées. D’autres données, comme les études de validité ou de cohérence interne sont tout aussi essentielles à connaître.

c/ Absence d’ « évaluation critériée », comment faire pour établir des objectifs fonctionnels et ciblés ?

Un questionnement qui revient de façon fréquente autour de la suite à donner au bilan psychomoteur est celui du choix des objectifs de soin et de la rédaction du projet thérapeutique du patient. Comment croiser nos résultats de bilan psychomoteur et les besoins du patient ? Que faire de certains résultats chutés à l’évaluation, mais éloignés du motif de consultation ?

Il ne semble pas y avoir de réponse préétablie à cette question, d’autant plus que nos bilans psychomoteurs sont, de tradition, davantage tournés vers le diagnostic que vers l’évaluation du retentissement fonctionnel des difficultés.

Une évaluation critériée est un process qui vise à déterminer les compétences acquises par un individu, à contrario des évaluations habituelles en psychomotricité, dans lesquelles on cherche à situer le niveau du patient vis à vis des autres individus.

Par exemple, dans les curriculums administrés dans l’ESDM issus de la méthode Denver (Rogers, 2013), nous retrouvons différentes compétences clairement délimitées (prête attention au son de la voix, regarde son partenaire lorsqu’on l’appelle par son prénom, suit le pointage proximal, suit le pointage distal…).

Il manque encore en psychomotricité des évaluations dites « critériées », guidant le choix et la mise en place des objectifs fonctionnels de suivi. Certains critères du BHK peuvent soutenir cet aspect dans la rééducation graphique, mais quid des autres items psychomoteurs ? Il convient de réaliser des entretiens dédiés à cet aspect, avec une recherche précise des attentes et des besoins de la personne accompagnée, pour dégager des objectifs ciblés, fonctionnels et en rapport avec les attentes des bénéficiaires.

d/ Subtest, sous-items et autres notes de composantes…

Un autre écueil est souvent de ne tenir compte que de la note globale du test (M ABC, BHK, NP Mot…), sans chercher à analyser les sous-items le composant. Dès lors que l’on dispose de notes intermédiaires, il est indispensable d’en tenir compte pour évaluer de façon plus précise le profil du patient. Par exemple, on peut obtenir un score global en moyenne faible sur un BHK et pour autant relever des scores très bas sur certains critères (écriture chaotique, lettres ambiguës) impactant considérablement la lisibilité. On retrouve un score normatif, ne réclamant pas de visu une intervention, mais une perte importante de fonctionnalité dans le graphisme !

Autre situation équivalente au M-ABC 2  : Il est tout à fait possible qu’un enfant présente un score limite  (N.S = 8) pour la note globale de composante (« dextérité manuelle » par exemple), « occultant » une note particulièrement chutée à une de ses sous-composante (« trajet » par exemple).

Il semble de fait indispensable de prendre en considération le tableau global dressé par l’anamnèse, l’ensemble des résultats du bilan chiffré, les observations cliniques relevées, les retours du patient et de son entourage et le contexte environnemental. Toute cette construction vient nourrir la démarche, le raisonnement clinique et constitue l’expertise du professionnel. 

Conclusion – Interprétation et mise en lien avec la clinique

L’interprétation du bilan psychomoteur n’est pas qu’une savante ronde de résultats chiffrés… C’est aussi et surtout la mise en lien des notes de l’observation clinique, des éléments contextuels, en rapport avec le motif de consultation et les hypothèses de fonctionnement psychomoteur envisagées. 

En effet, un « bon » résultat chiffré peut facilement occulter certains moyens de compensation mis en place par le patient (plus ou moins efficaces et coûteux) ou ne pas faire cas de certaines composantes annexes non évaluées par ce test (vitesse dans des évaluations non chronométrées, qualité du geste dans les épreuves uniquement chronométrées, non prise en compte des stratégies de planification, biais motivationnel…).

À contrario, un résultat « chuté » peut l’être du fait de facteurs externes aux fonctions évaluées (anxiété, biais attentionnel, difficultés de la commande motrice dans les tests graphiques ou de construction, difficultés de compréhension, troubles sensoriels…).

Gardons à l’esprit le but de l’évaluation psychomotrice : venir apporter des hypothèses de fonctionnement (parfois dans une démarche diagnostique), des éclairages autour de la problématique et des plaintes apportées par le patient, sa famille et l’environnement (scolaire, professionnel, etc).

L’intérêt des notations ne réside donc pas dans l’obtention de chiffres pour les chiffres mais dans leur interprétation au regard du fonctionnement global de la personne et du retentissement fonctionnel des difficultés relevées par le bilan.

Aurélien D’Ignazio, Oceanie Le Borgne, Elodie Lemoine, , psychomotriciens D.E

Bibliographie

Loizzo A, Zaccaria V, Caravale B, Di Brina C. (2023). Validation of the Concise Assessment Scale for Children’s Handwriting (BHK) in an Italian Population. Children (Basel). 27;10(2):223

Mojet J.W. (1991). Characteristics of the developing handwriting skill in elementary éducation. In J. WANN, AM. WING & N. NOVIK (Eds.), Development of graphic skills.London : academic press.

Rogers, S., Dawson, G. (2013). le modèle de Denver pour jeunes enfant. Dunod

Sur le même sujet :

– Site web : https://www.psychometrie.jlroulin.fr

– Article de blog :

-Document de synthèse sur les tests de l’examen psychomoteur : http://www.psychomot.ups-tlse.fr/Testspsy.pdf

Aucun commentaire

Sossey Alaoui Aya

Bonjour
Merci beaucoup pour cette page, tout le nécessaire en lien avec la cotation des tests psychomoteurs semble abordé et expliqué de façon très claire, j’ai pu y trouver la réponse à toutes mes questions.
5 étoiles!

Réponse

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